Élizabeth Borne vient de confirmer l’intention de l’État de détenir 100 % du capital d’EDF. C’est la méthode choisie par le gouvernement pour donner à notre champion de l’Énergie les moyens de son sauvetage, mais aussi de ses ambitions. Mais quelles seront les contreparties de ce projet ?…
Par Alain Desgranges*, membre de PNC-France
Il fait chaud. Il aura même fait très chaud dans ces mois de juin et de juillet où tous les records auront été pulvérisés !… Les catastrophes climatiques se succèdent sur une terre qui continue de brûler alors que les prix de l’énergie flambent dans des marchés complètement désorganisés.
C’est dans ce contexte que les dirigeants d’ENGIE, Total-Energie et EDF, prenant prétexte de la guerre en Ukraine, ont appelé les Français à réduire leur consommation d’électricité sous peine de coupures cet hiver. Une perspective certes rafraichissante en cette période de canicule, mais qui a dû en faire tomber plus d’un de sa chaise !…
Pourtant, il serait trop facile de mettre sur le dos du seul Poutine une situation que l’on doit d’abord aux apprentis sorciers qui pullulent dans les couloirs de l’Union Européenne ou dans les rangs des partis écologistes extrémistes, mais aussi aux errements de nos gouvernements successifs.
Car la vraie raison de cette gabegie serait à rechercher dans le marché de l’électricité européen et sa déclinaison française dénommée « Loi NOME ». Un marché inadapté à la situation de crise que nous vivons d’après un récent rapport de la Cour des Comptes. « Une réorganisation progressivement devenue illisible et ses effets difficilement compréhensibles » selon les sages (1).
La Commission européenne quant à elle n’a cessé de vouloir affaiblir EDF en recommandant la séparation de ses différentes entités. Pourtant, l’urgence climatique et la guerre en Ukraine donnent à la France des arguments puissants pour réhabiliter ce modèle d’une EDF intégrée. Car si le CO2 est bien l’ennemi absolu du climat, il faut le combattre avec l’énergie nucléaire qui doit retrouver une place essentielle dans un mix énergétique responsable. Dès lors, ne serait-il pas préférable d’être lucides et de faire preuve de résistance devant les agissements de nos « amis » allemands, égarés dans une stratégie fondée sur le développement massif de l’éolien qui conduit leur pays droit dans le mur ? Des « amis » par ailleurs bien décidés à torpiller notre filière nucléaire qui leur fait de l’ombre en produisant une électricité beaucoup moins chère que la leur, répondant à tout moment aux besoins du réseau et, cerise sur le gâteau, en émettant beaucoup moins de CO2 coupable du réchauffement climatique comme chacun le sait.
Il conviendrait aussi d’arrêter de vouloir tuer EDF, cette « poule aux œufs d’or » qui n’en finit pas d’être spolié par l’État avec le blocage des tarifs de l’électricité (hausse de 4% du tarif régulé en février 2022 alors que la CRE préconisait 35%), la non revalorisation du niveau de l’ARENH, ou encore l’obligation de mettre 20 TWh d’ARENH supplémentaires à disposition de ses concurrents.
La première ministre a donc fait de ce chantier l’un de ses objectifs prioritaires. De bon augure à la condition qu’il ne soit pas prétexte à un démantèlement de l’Entreprise, mais au contraire qu’il ait pour objectif le renforcement de son intégrité, la synergie du nucléaire avec les autres activités du groupe ayant fait dans le passé la démonstration de son efficacité.
Il est grand temps de passer des paroles aux actes et de faire preuve de résistance devant l’œuvre de destruction de la filière nucléaire française engagée par la Commission Européenne avec l’appui à peine dissimulé de l’Allemagne.
*Alain Desgranges est ingénieur en Génie atomique et membre de l’ONG PNC-France